Le sevrage représente pour le poulain la fin d’une dépendance à la fois alimentaire et comportementale. Sur le plan alimentaire, le sevrage est le passage d’une alimentation semi-lactée à une alimentation sèche qui peut se traduire par une période de ralentissement de la croissance si la préparation au sevrage est mal conduite.
Mon conseil ? Anticiper le sevrage et préparer le tube digestif de votre poulain à une alimentation solide. Alors quel aliment choisir ?
A partir de trois mois, le poulain doit faire face à une augmentation constante de ses besoins, alors que la production laitière de la mère diminue et qu’il n’est pas encore capable d’absorber une quantité d’herbe suffisante pour couvrir ses besoins. La valeur alimentaire de l’herbe à cette période de l’année est, en outre, moindre que celle du plein printemps.
Sauf lorsque la mère est une très forte productrice de lait, je vous recommande de distribuer à votre poulain un aliment spécifique souvent présenté sous la forme de floconnés ou de petits granulés très appétents. Cela permet d’intégrer une nourriture sèche et solide qui contient des céréales, des protéines végétales et des protéines laitières (lactosérum assez souvent).
Cet aliment viendra en soutien du lait maternel sur un poulain de 6 mois mais il ne le remplacera pas. En cas de sevrage à 6 mois, je vous conseille de continuer à distribuer cet aliment jusqu’au 1 an du poulain. Je vous conseille de proposer cet aliment à vos poulains à raison de quelques poignées au départ afin qu’il prépare son tube digestif à une alimentation solide. On considère que lorsqu’un poulain de selle en ingère 2kg par jour, le sevrage ne pose plus aucun problème nutritionnel car il est capable de digérer une ration solide (mais il n’a pas encore les capacités digestives de l’adulte pour les fibres qu’il acquiert vers 18 mois).
Si votre poulain à tendance à « voler » dans la mangeoire de sa mère et si elle le laisse faire, l’aliment spécifique reste utile pour les poulains sevrés à 6 mois. Cependant, n’oubliez pas de compenser pour la jument la quantité détournée par le poulain. Si la jument a un peu de mal à garder de l’état, je vous conseille d’alimenter le poulain à part pour qu’elle puisse prendre le temps de manger tranquillement toute sa ration. Ce mode de fonctionnement permet aussi de lui donner, le cas échéant, dans la nourriture des produits non adaptés au poulain.
Les aliments pour poulains de moins de 1 an sont des produits techniques, souvent plus chers que les aliments standards et qui rancissent vite. Je vous conseille de les acheter au fur et à mesure, de bien refermer les sacs ou les seaux et d’en proposer au poulains des quantités qui seront avalées dans l’heure quitte à y revenir plus souvent.
Ce type d’aliment est difficile à faire en aliment « maison », je vous conseille donc de l’acheter tout fait.
Pensez à adapter le régime du poulain à sa future activité !
Les besoins du poulain, du post sevrage à un an, varient en fonction de sa destination. En effet, on ne conduira pas un sujet voué à une utilisation précoce (course de plat ou de trot) de la même manière qu’un autre destiné à un débourrage tardif à trois ans et demi. Dans le premier cas, les vitesses de croissance devront être proches de son potentiel de croissance maximum (750g/jour). Dans le second, la vitesse de croissance pourra être limitée à 450g/jour pour optimiser l’utilisation de l’herbe à un an et faire jouer la croissance compensatrice.
Dans le cas de poulains utilisés précocement, la complémentation sous la mère est d’autant plus indispensable, dès l’âge de trois mois, pour préparer le poulain au sevrage.
Croissance du poulain : ne faites pas l’impasse sur les acides aminés.
Pour le poulain en croissance, l’augmentation de la quantité de protéines va de pair avec une augmentation qualitative. L’adjonction de lysine dans la ration permet d’augmenter la vitesse de croissance. Les apports recommandés concernant cet acide aminé (le plus important dans la composition musculaire du jeune cheval) sont de 0.6% de la ration totale à six mois et de 0.5% à un an, ce qui représente environ 40 à 50 g/al/jour.
La lysine n’est présente en quantité importante que dans certains aliments comme la poudre de lait, le lactosérum, les luzernes déshydratées et le tourteau de soja, ce dernier étant le mieux équilibré en acides aminés. Ces aliments doivent donc occuper une place de choix dans la complémentation du poulain au sevrage.
Les compléments en minéraux, ils ont leur importance !
L’équilibre de la complémentation minérale est également très important à cette période, notamment pour prévenir l’apparition de troubles ostéoarticulaires.
Les apports recommandés en calcium et phosphore sont accrus par rapport à l’entretien, et le rapport Ca/P doit être voisin, à cette période, de 1.8. Ils sont de 150 à 180mg/kg de PV/jour pour le Ca et de 90 à 110 mg/kg de PV/jour au sevrage.
Les besoins en potassium et magnésium sont généralement couverts par les rations comportant une proportion de fourrage correcte.
L’apport en sodium est couvert par la mise à disposition d’une pierre à sel pur, le poulain ajustant sa consommation en fonction de ses besoins.
Les oligo-éléments peuvent intervenir dans la protection des troubles ostéoarticulaires, certains besoins étant encore mal connus chez le poulain. Les besoins en fer (50 mg/kg de MSI (Matière Sèche Ingérée) sont, en général, couverts par la ration. Le cuivre intervient dans la synthèse de nombreux tissus et conditionne le développement osseux : une teneur minimum de 13 mg/kg de MSI (7 à 8 kg de MS/al/jour) dans la ration est recommandée, sachant que la majorité des fourrages est pauvre en cuivre (4 à 5 mg/kg de MS). Une teneur de 32 mg/kg de MSI (10 à 12 kg de MS/al/jour) est recommandée dans la ration de la jument en gestation à partir du 7ème mois pour prévenir l’apparition de troubles ostéoarticulaires.
Le zinc intervient également dans le métabolisme osseux. Les apports recommandés sont de 50 mg/kg de MSI, son assimilation pouvant être diminuée en cas d’excès de Ca et P dans la ration.
Le sélénium intervient également dans l’ossification et la protection des dégénérescences musculaires. Les besoins sont de l’ordre de 0.1 à 0.2mg/kg de MSI. Il agit en synergie avec la vitamine E dont les besoins se situent aux alentours de 20 mg/100 kg de poids vif. Les besoins en vitamine A sont de l’ordre de 35 000 UI/al/jour, un rapport VitA/VitD devant être respecté.
En résumé, on peut donc distribuer à partir du 4ème mois de naissance, voire du 3ème mois si le poulain est né plus tard en saison et si la quantité et la qualité du pâturage est moindre, une complémentation à raison de 1kg ou 500 g selon le cas, et augmenter progressivement la quantité distribuée à raison de 500 g/mois d’âge, jusqu’au sevrage, pour atteindre un apport de 2 kg/al/jour. Le poulain sera ainsi habitué à l’ingestion d’aliments secs qui seront conservés lors du sevrage et le mois suivant. Il pourra être modifié par la suite en fonction de l’objectif de production et la qualité des fourrages utilisés.
Anaël MARZIN
Responsable marché Equideos